Pourquoi fait-on si peu?

Publié le par Beurk

Au risque de me répéter, il me semble que lorsqu'on se pose la question de l'environnement, on ne peut qu'être frappé de la faiblesse de la réponse politique à la crise qui s'annonce. Oh, certes, de grandes déclarations d'intentions sont faites régulièrement par nos hommes d'état, de spectaculaires "Grenelle" sont organisés, mais l'action au jour le jour est loin d'être à la hauteur. A l'heure où les académies des sciences avertissent du danger du changement climatique et où l'ONU compile dans de volumineux rapports l'ensemble des risques environnementaux, on est en droit de se demander pourquoi tout ceci n'est pas suivi d'effet.

Une réponse légère est d'accuser les écolos qui, par leurs exagérations et leurs outrances auraient déconsidéré la cause pour laquelle ils se battent. Cela ne tient guère, la marginalisation de ces thématiques est largement dépassée, et les écolos, aujourd'hui sont loin d'être les seuls à s'emparer du sujet(ce qui n'est pas sans leur poser quelques petits problèmes électoraux...). Non on parle aujourd'hui tellement de la nécessiter de "sauver  la planète"(je trouve d'ailleurs cette expression idiote) que vraiment, attribuer
aux excès des verts, l'inadaptation des efforts aux enjeux est absurde.

Plus sérieusement, l'idée est parfois évoquée que, malgré certains discours, les hommes politiques ne sont pas réellement sensibilisés au problème. La plupart d'entre eux est encore imprégné de l'univers des trente gorieuses, à l'époque où le progrès technique et la croissance semblaient devoir apporter des solutions à tous les maux. Pour eux l'écologie n'est un sujet qui peut rapporter quelques voix, mais qui n'est pas vraiment important. C'était déjà l'attitude d'un Giscard, qui, en 74 avait inclus dans son programme de second tour l'extension des parcs publics en ville(!), afin de récupérer les électeurs de René Dumond...

Je pense qu'il y a du vrai dans cette analyse, l'environnement étant le plus souvent ramené à une mode, les politiques surfent dessus, comme ils peuvent surfer sur, par exemple, l'engouement autour des évènements sportifs. Par contre, je ne crois pas qu'on puisse tout ramener à cela, les avertissements du GIEC, pour ne citer qu'eux ne peuvent pas être totalement ignorés de nos dirigeants. Ainsi, les déclarations récentes autour du prix du pétrole montrent que la question de la raréfaction des carburants fossiles n'est pas ignorée par ceux qui nous gouvernent.

On peut aussi invoquer, comme raison de la distance entre les actes et les discours sur l'environnement, l'hostilité des différentes clientèles électorales. Il faut le dire franchement, si tout le monde est d'accord lorsqu'il s'agit de s'engager à préserver la planète dans un état viable pour nos descendants, l'unanimité tombe lorsque nous faisons, nous, les frais des mesures qui découlent de cet engagement. Le cas des pêcheurs est à cet égard symptomatique. Aucun d'entre eux, bien évidemment, ne souhaite laisser une mer vidée d'une partie de ses espèces à ses enfants, mais par contre, la plupart d'entre eux ont une famille à nourrir, une maison à finir de payer et voit d'abord ses propres difficultés économiques. C'est pourquoi ils se réfugient dans le déni du problème de la sur-pêche, et se révoltent contre les quotas qu'on leur impose. On retrouve la même chose lorsqu'il s'agit de faire face aux conséquences de la raréfaction des carburants fossiles: la plupart des automobilistes  ne veulent pas entendre parler de remplacer leur moyen de déplacement favori par les transports en commun. Lorsque les chefs d'état et de gouvernement sont élus, ils ne peuvent pas ne pas tenir compte de ces demandes à court terme des populations.

Ces raisons n'expliquent pas tout. En fait, je crois que la cause plus fondamentale du caractère dérisoire des actions entreprises vis à vis des enjeux est plus simple et plus fondamentale. Nos dirigeants sont à la charge de nations, pas de l'humanité tout entière. Leurs actions tendent donc à privilégier les intérêts de ces nations. Hors ceux-ci sont souvent opposés à ce qui serait nécessaire pour l'humanité. Pour un pays donné, il serait parfait que les efforts pour diminuer les gaz à effet de serre soit effectués  par le reste du monde, tandis que ce pays continuerait à faire fonctionner son économie sans entrave. Bref, tout se passe comme si le monde entier était pris dans un immense dilemme du prisonnier, où tout le monde rivalise de déclarations d'intentions et où chacun cherche à biaiser vis à vis de ses engagements.

Le seul moyen pour sortir de ce piège, ce serait d'utiliser des sanctions pour ceux qui ne respecteraient pas les règles du jeu. Cela signifierait taxer les produits en provenance de ces pays. Cette remise en cause du libre-échange apparaît totalement impensable aujourd'hui tant l'emprise du libéralisme économique semble forte...

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A
Les sciences "dures" (sciences exactes) sont aujourd'hui capables de nous fournir des modèles prospectifs assez précis (même si peut encore avoir des querelles sur la question des incertitudes), mais les sciences "molles" (sciences humaines) ne savent pas encore vraiment bien nous renseigner sur la vitesse à laquelle l'humanité (ou tout au moins une fraction significative) peut changer de modèle sociétal.<br /> <br /> Ma première estimation est que cela se mesure en plusieurs dizaines de générations. Autant dire que les énergies fossiles seront épuisées bien avant qu'on ait, de nous-mêmes, fait le choix de civilisations qui savent s'en passer.
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O
Bien vu ! N'est on pas tous ancrés dans un système trés confortable ?
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T
bonjour ABC. C'est également une question de temporalité. Les décideurs et dirigeants sont d'abord les principaux bénéficiaires de l'organisation sociale : ils n'ont donc aucunement envie de l'infléchir en raison d'inconvénients qu'il localise dans un futur éloigné, époque où ils ne seront plus au pouvoir...
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B
<br /> Oui, c'est vrai, cet aspect des choses jouen aussi. Le système politique pousse à avoir un horizon de 10 ans tout au plus.<br /> <br /> <br />